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DAECH LA SUITE

À chaque nouvel attentat revendiqué par le terrorisme isla- miste, on entend certains élus, ou « experts », expliquer que nous avons passé le plus gros du danger avec la chute de Daech à Rakka en 2018. Le retour de milliers de combat- tants n’entamerait pas la sécurité du Vieux Continent! Comme si l’histoire de ces vingt dernières années avait démontré que la fin d’un mouvement terroriste, ou son affaiblissement, par exemple Al-Qaïda, ne laissait place à l’émergence d’aucune structure héritière… De nouvelles filières, et de nouveaux groupes, se reconstituent partout dans le monde. Et comment traiter les combattants ou sympathisants de la cause djihadiste revenus dans nos sociétés? Revenant sur l’historique des mouvements isla- mistes – qui est sa spécialité –, et sur Daech en particulier, liant le capitalisme et la mondialisation à l’évolution de cette idéologie, Sébastien Boussois met en garde contre une dangereuse naïveté. À lire d’urgence.

SORTI LE 5 SEPTEMBRE 2019

DISPERSION DU DJIHADISME ET BIG BANG IDEOLOGIQUE

Il est toujours étonnant à chaque nouvel attentat tragique survenu en Europe d’entendre certains politiques ou experts persistant à nous expliquer que nous avons passé le plus gros du danger depuis la chute de Daech [groupe État islamique] et que les retours de combattants n’ont pas été si catastrophiques. Chaque attentat survenu en France ou en Occident nous renvoie inévitablement en réalité à nous interroger sur la géopolitique mondiale de l’islamisme et à la puissance de captation d’une idéologie matérialisée sur un territoire disparu, mais qui n’en serait en réalité devenue que plus puissante et universelle.

Aujourd’hui, l’internationale islamiste est nourrie par un véritable « big bang idéologique », une force naturelle difficile à éradiquer : car après l’heure de l’attraction de milliers d’individus vers son centre gravitationnel, c’est l’heure désormais, non pas de sa disparition, mais bien de la dispersion dans le monde entier de l’idéologie de mort.

Ce n’est donc pas uniquement une question de danger représenté par des combattants aguerris de retour de Syrie ou d’Irak, mais bien d’une armée de l’ombre de jeunes dont la vocation pourrait se déclencher pour au moins deux raisons : déception de la courte durée du projet daechiste et conviction qu’un complot, un de plus, est à l’origine de l’effondrement de leur « rêve » de résurrection de l’homme musulman nouveau sur une terre nouvelle.

Sur une armée de près de 80 000 soldats, Daech a attiré en cinq ans entre 20 000 et 30 000 combattants étrangers venus du monde entier, soit en réalité près de 80 pays. Cela signifie que l’idéologie de Daech a non seulement suffisamment infusé pour représenter un corpus idéologique crédible et légitime aux yeux de milliers de jeunes prêts à rejoindre ses rangs, mais cela signifie aussi qu’au-delà de ceux qui ont passé le cap, un grand nombre dont on ignore encore l’ampleur, et pour cause, est en train de se radicaliser progressivement dans une montée des tensions mondiales autour de l’Islam. Les causes qui ont entraîné nombre de jeunes à adhérer à cette idéologie n’ont à ce jour trouvé aucune solution, et ce terreau en veille peut être sollicité à la prochaine fenêtre d’opportunité : répondre à leur mal-être et leur donner un sentiment d’existence. Enfin. Depuis trois ans, tout est investi dans le sécuritaire, mais si peu dans la prévention de la radicalisation en amont, et ce, dès l’école.

Nouvelle ère ?

À chaque attentat, on nous explique que la chute de Daech est le début d’une nouvelle ère. Mais laquelle ? Celle de la paix ? Celle du retour au calme ? Bien au contraire : il y a fort à craindre que ce ne soit qu’un retour provisoire avant la tempête. L’idéologie fermente mondialement et les graines sont en train de germer.

L’attentat de Trèbes, revendiqué probablement de manière opportuniste, l’a été rapidement par une « antenne » cachée de Daech via son agence de presse. Peu importe, car ce qui compte, c’est bien de continuer à terroriser, le temps de la restructuration et de la dissémination des djihadistes sur de nouveaux terrains de combat et d’agitation. Mieux : c’est l’occasion, après une première expérience de califat réussie, puisque matérialisée alors que personne n’y avait cru, de tenter désormais l’expérience ailleurs et de développer ou de renforcer des territoires acquis à la cause depuis l’Asie, comme les Philippines ou l’Indonésie, l’Afrique centrale et de l’Ouest (comme au Nigeria avec le califat de Sokoto), ou les Balkans (où la Bosnie Herzégovine est un territoire sensible où a eu lieu le plus grand génocide de musulmans de l’histoire récente en 1992 à Srebrenica, et qu’il suffirait d’invoquer pour le venger et en faire une cause nouvelle de combat, cette fois-ci au coeur même des frontières terrestres de l’Europe).

La cause djihadiste regarde vers l’avenir, mais n’oublie pas le passé. Il ne faut pas oublier les terres d’origine du djihad, qui n’ont jamais été expurgées définitivement du mal : les FTF (foreign terrorist fighters) sont suffisamment endoctrinés, galvanisés et prêts à aller jusqu’au bout pour ne pas rentrer chez eux pour finir en prison, mais bien au contraire plutôt prêts à se rendre sur des lieux de « ressourcement ». Car le premier Daech fini, le retour aux origines permettra probablement de reprendre de la force idéologique et physique : Afghanistan et Sahel sont de parfaites poches de repli le temps de se refaire.

Territoire mondial virtuel

Le premier Daech serait-il en réalité un premier signe lancé ? Voire un signe divin ? C’est une possibilité : Damas et Bagdad, capitales historiques de vrais grands empires civilisationnels, purifiés de leurs mécréants, n’ont jamais été aussi près de ressusciter. Avec Internet, ce n’est plus un petit territoire régional et localisé qui peut exister temporairement : c’est un gigantesque territoire virtuel mondial qui peut se développer éternellement. Internet est un vrai cimetière vivant.

Autre point de ressourcement qui concourt à maintenir vivante et floue la réalité de l’idéologie daechiste : se redéployer pour le moment selon un modèle plus proche de celui d’al-Qaïda, c’est-à-dire mondial, universaliste et extraterritorial.

L’objet de notre propos n’est pas d’inquiéter outre mesure l’opinion. Il est de penser différemment l’évolution d’un mouvement politique et religieux extrémiste qui n’a rien à voir avec les mouvements d’extrême gauche ou d’extrême droite qui, à un moment ou à un autre, ont fini par s’effondrer. Définitivement ? Jamais. C’est reculer pour mieux sauter. Il en reste toujours quelque chose, malgré les horreurs. Il faut voir désormais plus loin : pour la prévention de la radicalisation qui prend du temps à faire ses preuves, un temps nécessaire, comme pour la prospective autour des enjeux de la géopolitique mondiale des 20 prochaines années. Les analyses courtermistes et rassurantes dans l’instant pour satisfaire l’opinion nous ont déjà coûté assez cher en Occident et ailleurs. Trèbes n’est pas qu’un petit village de l’Aude, dans le sud de la France, au coeur du Vieux Continent. Il est une poussière d’atome au beau milieu de la galaxie globale, mais qui a son importance.

 

https://www.ledevoir.com/opinion/idees/523918/dispersion-du-djihadisme-et-big-bang-ideologique

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La Bosnie Herzégovine, une poudrière en puissance

La Bosnie-Herzégovine, une poudrière en puissance (OPINION)

CONTRIBUTION EXTERNE Publié le – Mis à jour le 

OPINIONS

UNE OPINION DE SEBASTIEN BOUSSOIS – Docteur en sciences politiques, chercheur Moyen-Orient et relations euro-arabes. Collaborateur scientifique à l’ULB et à l’UQAM. 
 
 

Un an après avoir déposé sa candidature à l’UE, celle-ci est à examiner. Ecartée, la Bosnie-Herzégovine pourrait en effet devenir un foyer actif de contestation et de radicalisation.

Au nom de sa sécurité, l’Europe à trop regarder son rivage sud, aussi bien sur les questions de radicalisation que la question des réfugiés, a tendance à négliger le cœur de son espace géographique. Ce que l’on pourrait appeler son « heartland ». Ce cœur géographique qui s’il est contrôlé permet la mainmise sur l’ensemble plus vaste dont il fait partie. Les documentaires et les articles de presse écrite se suivent en ce moment et se ressemblent sur le risque que représente un pays comme la Bosnie Herzégovine, poudrière de l’ex-Yougoslavie, musulmane à 95 %. Pourtant, rien n’y fait.

Sarajevo n’est pas une priorité

Alors que la Croatie a intégré le club très convoité des 28, Sarajevo n’est absolument pas une priorité dans la politique de voisinage européenne. Pourquoi est-ce une erreur fondamentale de Bruxelles ? Et pourquoi devrait-on s’inquiéter ?

Premièrement, parce que le conflit qui a déchiré la région dans les années 1990 a vu se confronter des nationalismes très virulents : le rêve de grande Serbie de Belgrade s’est confronté à la résistance croate sur un terrain de guerre bosnien. Sarajevo a vécu le plus long siège de l’histoire, 4 ans, avant la fin du conflit. Entre-temps, il y eut un génocide de musulmans, reconnu comme tel par les Nations unies, et ce à de rares exceptions strictement définies par le droit international, de la population de Srebrenica par les Serbes. Près de 8 000 musulmans seront exterminés sur le champ de bataille en 1995. Les premiers djihadistes européens, au sens de ceux que nous connaissons actuellement, investiront très rapidement la région dans les années 1990, au nom d’une défense de l’islam contre l’orthodoxie serbe et son rêve de Grande Serbie qui remonte à des siècles.

Deuxièmement, la fin de la guerre et les accords de Dayton en 1995 verront la présence de la coalition menée par l’Otan et les Américains s’installer fermement dans la région pour restaurer une part de paix. Mais le symbole même de l’écrasement des musulmans en Bosnie n’a certainement pas disparu et n’a jamais été vengé. Année après année, les Etats-Unis vont se retirer.

Troisièmement, et ce parallèlement, après la fin de la guerre, Arabie saoudite et Pakistan vont investir le pays pour inonder la population de leur idéologie. Lorsque l’on se rend à Sarajevo aujourd’hui, on est immédiatement frappé par le style des mosquées flambant neuves qui n’ont rien à voir avec un style maghrébin ou « européen ». En 2011, on parlait de près de 3 000 islamistes dangereux. Aujourd’hui, les rangs vont se gonfler. L’idéologie salafiste s’est implantée dans la région, sur un terreau fertile d’humiliation et de massacres. Pour autant, aucune mosquée ne semble être sous le contrôle des salafistes. Tout le paradoxe. Il faut rappeler que l’islam des Balkans est plutôt sunnite d’inspiration libérale. Très souples avec les intégrismes, les autorités bosniennes avaient serré la vis après le 11-Septembre. Pour autant, le symbole puissant pourrait l’emporter sur la réalité molle encore à l’heure actuelle. Mais comment feront-ils face à l’arrivée des djihadistes du terrain moyen oriental qui préféreront venir ici plutôt que rentrer en France, en Belgique ou ailleurs ?

Des sites stratégiques

Daech est mort, vive Daech. Les franchises sont déjà nombreuses, depuis l’Afrique de l’Ouest jusqu’à l’Asie du Sud Est. Les djihadistes aiment revenir à leurs premières amours : l’Algérie, l’Afghanistan, l’Irak. Mais également sur des terrains plus neufs : c’est le cas des anciens pays décolonisés aux structures étatiques très faibles comme le Mali, mais aussi de l’Indonésie ou des Philippines. Quid des Balkans ? Beaucoup de jeunes qui ont déserté la Syrie et l’Irak, se retranchent petit à petit sur d’autres sites stratégiques qui peuvent perpétuer la cause djihadiste sur des motifs antioccidentaux. Il faut bien reconnaître que les Balkans sont encore quelque peu sous-exploités idéologiquement et symboliquement. Le génocide de Sreberenica a de quoi être encore largement réexploité pour mobiliser des centaines d’individus, ou déclencher de nouvelles vocations, qui n’auront pu accomplir leur rêve en Syrie. Ce qui est sûr c’est que contrairement à ce que certains pensent, la menace se rapproche de nous. Elle ne s’éloigne certainement pas après l’éphémère Etat islamique. Au contraire, les combattants de Daech ont prouvé qu’un début de renaissance était possible. Il suffit juste de renouveler l’opération tout autour du bassin méditerranéen en démultipliant la menace. La main-d’œuvre locale et désœuvrée en Europe ne manque pas. Rien n’a été réglé à ce stade pour rendre tous les Européens plus égaux entre eux.

Le 15 février 2016, la Bosnie Herzégovine a déposé sa candidature à l’Union européenne. Il vaudrait mieux lui accorder une attention toute particulière. Démographiquement, elle ne pèse rien au regard du vieux continent européen, mais écartée, elle pourrait devenir un foyer actif de contestation et de radicalisation. Le parallèle avec la Turquie serait peut-être trop rapide, mais intégrer la Serbie qui est passée par des phases bien compliquées en termes de violence politique et ne pas intégrer la Bosnie, serait un mauvais signal lancé aux 50 % de musulmans du pays.

LE NAUFRAGE DE LA MEDITERRANEE, réédition revue et actualisée 2018

Mer fermée mais mer d’ouverture, la Méditerranée se replie malheureusement jour après jour sur elle-même depuis des années pour devenir une frontière infranchissable entre ses rives nord et sud. Berceau de l’humanité, elle semble devenir aujourd’hui un cimetière marin mais également la nécropole des relations avec l’Europe.

 

Le contexte géopolitique fracassant dans lequel est plongée la Méditerranée depuis quatre ans renvoie dos à dos Union européenne et monde arabe sur la véritable dynamique de dialogue et de coopération à adopter pour pacifier et réhumaniser cet espace unique au monde. L’image du petit Aylan Kurdi, 3 ans, mort sur les côtes turques, a fait le tour du monde et est devenu le symbole de ces millions de réfugiés qui ont fui les guerres en Syrie en Irak, mais aussi de ces milliers de Subsahariens qui tentent chaque année l’Eldorado depuis le Maghreb vers Gibraltar ou Lampedusa. L’Europe a peur et se replie. Ce livre est le récit politique de ce naufrage des relations humaines.

 

Pourtant, il faut bien comprendre que ces vagues d’immigration, qui ont aussi fait et refait l’Europe plusieurs fois dans son histoire, ne sont que le début d’un long voyage pour des millions d’individus qui fuiront non seulement les guerres engendrées par l’homme, mais également, et surtout, les changements climatiques causés par l’homme. C’est alors que les êtres humains n’auront plus d’autre choix que de redevenir solidaires s’ils veulent survivre.

 

 

Format 145X190

192 pages

EAN 9782367601144

18€

Tribune Le Devoir (Québec) Contrer la radicalisation passe par la lutte commune

IDÉES

Contrer la radicalisation passe par la lutte commune

4 mai 2017 | Sébastien Boussois – Chercheur en sciences politiques associé à l’ULB (Bruxelles) et formateur à Unismed (Nice), spécialiste des relations euroméditerranéennes et coauteur avec Asif Arif de «France Belgique. La diagonale terroriste» | Actualités en société

Depuis que Daech semble en déroute sur la terre de Cham, jamais le monde n’a semblé avoir été autant sous la menace aveugle de terroristes solitaires, du Moyen-Orient à l’Europe, de l’Afrique à l’Amérique du Nord. La réalité est que, si un territoire se fait peau de chagrin, l’idéologie qui a animé le projet du groupe État islamique a largement essaimé de façon directe ou insidieuse dans la tête de milliers de jeunes frustrés, déçus, ou en recherche d’un destin.

Les terribles attentats qui ont frappé Paris le 13 novembre 2015, Bruxelles le 22 mars 2016, sont encore dans tous les esprits des Français et des Belges, mais également des Européens. L’attentat contre la mosquée de Québec le 30 janvier 2017 a marqué un coup pour un Canada multicommunautaire. Depuis les attentats de Londres en 2005, la tolérance, voire le laxisme, à l’égard du « Londonistan » s’était éteinte. […]

La volonté de Daech de toucher au coeur nos « modèles » d’intégration, du Vieux Continent au Nouveau Monde, est claire. […]

Parce que, dans les trois pays visés, la diversité ethnique, culturelle, sociale, peut encore et doit continuer à être perçue comme une richesse. Que vise l’idéologie de Daech ? Le chaos et la polarisation de nos sociétés, provoquer un choc culturaliste en montant les « musulmans » contre les « chrétiens ». Quel point commun entre tous ces attentats ? Une volonté claire de provoquer une guerre civile au sein même de nos sociétés. Quelle différence ? L’endoctrinement de quelques jeunes « homegrowners » musulmans d’un côté, la folie d’un étudiant canadien aux idées nationalistes et racistes de l’autre.

Un travail quotidien

Dans un contexte de montée mondiale des populismes, panser ses plaies devient un travail quotidien pour les centaines de personnes meurtries psychologiquement par ces drames. Du côté des « professionnels », les services de sécurité comme de prévention de la radicalisation, la longue route pour permettre de mieux « penser » ces plaies est en marche.

Car il y a toutes les raisons de croire que nous ne sommes qu’au début d’une lame de fond qui germe dans nos sociétés qui semblent de moins en moins inclusives.

Parce que trop longtemps en réaction contre d’hypothétiques menaces, nous avons tout misé sur le sécuritaire et sur la stigmatisation des minorités. Et ce, au risque de détricoter des réseaux locaux importants de prévention des déviances de la post-adolescence, depuis l’école jusqu’aux services sociaux, de la protection de l’enfance jusqu’aux associations de prévention de la radicalisation (quelles qu’elles soient, des sectes comme les Témoins de Jéhovah aux familles nouvel âge qui refusent la médecine moderne et les vaccins, etc.).

En attendant, des jeunes continuent à décrocher et verront encore longtemps en Daech ou ses succursales un potentiel pour rêver d’une meilleure existence, et s’ils ne trouvent pas de vrai sens à leur vie, ils finiront par au moins en trouver un à leur mort. Pire, des illuminés de tous poils se radicalisent en fusionnant leur trouble psychologique et l’adrénaline provoquée par le déclenchement de la violence contre les autres et contre soi.

Pour lutter contre ces déviances qui peuvent rapidement virer au tragique, de nombreuses organisations de prévention de la radicalisation, timidement soutenues jusque-là par l’État, peinent à rattraper leur retard. Au Canada, à Montréal, le CPRMV (Centre de prévention de la radicalisation de Montréal menant à la violence), fort de son expérience de « désengagement » d’un certain nombre de jeunes de l’extrême droite violente, est à la pointe. Son action doit nous servir en Europe. Quand on sait que le Québec est l’État canadien qui compte le plus grand nombre de groupes d’extrême droite et que le CPRMV a fait ses preuves en la matière. Quand on sait aussi que le jeune étudiant en sciences politiques de la mosquée de Québec était un sympathisant des thèses de Marine Le Pen.

Larges déviances

Il faut que l’on comprenne aussi en Europe que la radicalisation ne touche pas que les dérives de l’islam, mais un spectre bien plus large de déviances. L’extrême droite violente en fait partie. Nos associations en Europe font un travail de pédagogie fondamental auprès du personnel public, mais également auprès des écoles, dans la prévention des dérives violentes de l’islam. […]

Nous ne sommes pas seuls et isolés et le partage d’expériences entre pays, voire entre continents, commence à faire son chemin. En juillet 2017, à Marseille, se tiendra à l’initiative d’UNISMED, soutenu par la Fondation de France et la Fondation roi Baudouin, la « Conférence euroméditerranéenne : réunir société civile, praticiens et chercheurs pour agir en amont de la radicalisation ». L’idée est de fédérer près d’une centaine d’organisations et de praticiens des deux rives de la Méditerranée pour créer un grand réseau euroméditerranéen de partage d’expériences de prévention de la radicalisation en matière d’islam violent. Car de nombreuses actions ont réussi. Il faut le dire. Et seule la prévention peut réussir à rattraper nos jeunes avant qu’il ne soit trop tard.

Les liens entre l’Europe et le Canada dans le domaine sont déjà importants. Cela prouve que, malgré des politiques d’État réticentes, la société civile est à l’avant-garde et doit être soutenue. C’est une mission de salut public et les mers doivent nous rapprocher, et non pas nous couper. Le problème est mondial, la solution le sera aussi. Pour que ces solutions ne soient pas définitivement noyées dans la peur, le rejet, les préjugés, la violence, la folie ! Et donnent le champ libre aux partis politiques populistes qui, une fois installés aux commandes de nos pays, risqueraient de parachever indirectement le souhait de Daech : enterrer ce terme considéré désormais par beaucoup comme éculé de « vouloir vivre ensemble ».

Notre urgence est donc bien de tout miser sur l’éducation, la culture, la production de contre-discours, la dynamisation des réseaux existants, la reconsidération de la question de la menace d’un point de vue euroméditerranéen et euroatlantique. C’est un défi que de (re)donner confiance à nos jeunes, de (res)susciter l’adhésion aux valeurs de la nation et de la démocratie, d’accentuer le combat contre les populismes haineux qui creusent notre tombeau. Il s’agit bel et bien en définitive de « penser » nos blessures et nos plaies, et plus uniquement de les panser en attendant le prochain drame !

Carte blanche Le Soir Un quinquennat décisif pour lutter contre le terrorisme

http://plus.lesoir.be/92567/article/2017-05-04/un-quinquennat-decisif-pour-lutter-contre-le-terrorisme-par-la-prevention-de-la#

Beaucoup ont pensé que le tragique attentat des Champs-Elysées survenu le 20 avril à trois jours du premier tour du scrutin présidentiel et qui a coûté la vie au policier Xavier Jugelé, renforcerait le camp des partisans de François Fillon. Ce n’était pas faute d’avoir essayé en propageant la rumeur ce soir-là que ce n’était pas un mais plusieurs attentats qui avaient eu lieu à Paris.

Les électeurs, une fois éliminé le candidat des Républicains, n’ont pas davantage renforcé le camp de Marine le Pen et c’est tant mieux. Les prévisions des sondages n’ont pas été bouleversées et les électeurs ont plébiscité Emmanuel Macron, qui a, en moins de trois ans, fait une percée fulgurante sur la scène nationale, dans un contexte permanent de risque terroriste.

Le lendemain de l’attentat, il déclarait pourtant devant les micros de RTL : «  Je ne vais pas inventer un programme de lutte contre le terrorisme dans la nuit  ». Y a-t-il de quoi s’inquiéter face à une candidate du FN qui trouve justement celui qui est finalement bien arrivé en tête du premier tour un peu «  faiblard  » sur ces questions de sécurité pour les Français face au « terrorisme islamiste » ? Quel est son plan exact en la matière s’il est élu président le 7 mai ? Lucide, il déclarait comme un fait que «  cette menace fera partie du quotidien des prochaines années  ». Le 4 février 2017, Emmanuel Macron livrait ses propositions en termes de lutte contre le terrorisme : «  Notre combat ce sera celui de la liberté  » avait-il déclaré lors de son meeting à Lyon. Il faut augmenter le budget de la défense pour le porter à un budget équivalent à 2 % du PIB, recrutement de 10.000 fonctionnaires, renforcement des capacités du renseignement territorial, création d’une police de sécurité quotidienne, renforcement de la coopération entre les services de police des Etats membres de l’UE. Quid en termes de prévention ? A ce stade pas grand-chose.

Développer des outils à l’école, sur internet, dans les quartiers

En avril 2017, le candidat Macron révélait son plan de lutte contre le terrorisme sur internet : lutte contre la propagande daeshiste et accès des autorités aux données chiffrées (notamment en contraignant les messageries instantanées à fournir à l’État leurs clés d’accès). En effet, Macron visait le rôle des nouvelles technologies dans la contagion des idées djihadistes sur nos territoires virtuels et réels, appelant à un plus grand contrôle sur les messageries instantanées.

C’est un début mais la menace islamiste ne s’enrayera pas en maintenant uniquement l’état d’urgence et le tout-sécuritaire, mais bien en privilégiant la prévention de la radicalisation par divers outils à l’école, dans les quartiers, sur internet, en prison.

Pour cela, il faut donner tous les moyens possibles aux associations et aux organismes de prévention qui travaillent en local et dans une articulation avec le national. Le dernier rapport sénatorial de 150 pages déposé par Jean-Marie Bockel et Luc Carvounas le préconise largement. Or, les rapporteurs dénoncent entre 2016 et 2017 un ralentissement de la proportion des budgets liés à la prévention de la radicalisation dans l’enveloppe globale du FIPD, le Fonds interministériel de prévention de la délinquance : en effet, si l’enveloppe consacrée à la prévention de la radicalisation augmente (de 9 à 15,1 millions d’euros entre 2016 et 2017), le pourcentage des crédits alloués à la prévention sur l’ensemble des crédits destinés à la lutte contre la radicalisation pas : «  En effet, en 2016, les crédits destinés à la prévention de la radicalisation représentaient 48 % de l’enveloppe consacrée à la lutte contre la radicalisation et le terrorisme, alors qu’en 2017 cette proportion dépasse à peine les 30 %  ». (1)

Réajuster les propositions

Défendre la prévention est un combat permanent. Il faut suivre cela de près car beaucoup voient la prévention comme un travail de trop longue haleine sans résultats immédiats. D’autant que nous sommes paraît-il à l’heure de la post-vérité, c’est-à-dire à un moment où les politiques orientent les débats vers la stimulation des émotions populaires plutôt que de les calmer ; ce qu’elles engendrent de contre-vérités l’emporterait alors sur la réalité. La réalité augmentée de ces passions décuplées devient alors vérité.

En plébiscitant Macron et Le Pen, les Français semblent partagés entre l’idée que le FN répondra à leurs peurs et de l’autre qu’En Marche ! les ramènera à la raison. L’un est populiste, l’autre ne l’est pas. Volontairement ou pas, il n’a pas surjoué la carte du risque terroriste. Mais l’inciter à prévoir davantage en termes de prévention ne signifie pas brandir les peurs !

Après celui des Champs-Eysées, le risque d’un nouvel attentat dans l’entre-deux tours reste plausible. Peut-il bouleverser la donne en faveur d’une candidate populiste plus ferme sur le sujet ? Avec le « Tous contre Le Pen », cela est peu probable. Mais c’est un risque présent pour les indécis, les déçus du scrutin du 23 avril, pour ceux qui rejettent le vote utile. Le peuple serait-il encore à même d’entendre les recommandations de leurs candidats déchus ? En tout cas les deux finalistes devront réajuster leurs propositions mais pas uniquement en termes de sécuritaire.

Emmanuel Macron doit renforcer son arsenal préventif et c’est là dessus qu’il peut se démarquer et rassurer. On ne sait que trop qu’il vaut mieux prévenir que guérir. C’est la seule solution et le travail local quotidien en faveur des jeunes doit avoir de plus grands moyens. Il y a peu de risque toutefois que Marine Le Pen gagne le second tour de l’élection présidentielle mais si le futur Président Macron ne met pas en application le duo sécurisation et prévention, les cinq années à venir, dans un contexte international des plus flambants, risquent bien d’être un chemin de croix qui ne favorisera à terme que l’extrême droite qui se préparerait alors de beaux jours pour 2022.

* Sébastien Boussois est coauteur, avec Asif Arif, de France Belgique, la diagonale terroriste (éd. La Boîte à Pandore, octobre 2016), préfacé par Marc Trévidic. (1) Voir rapport d’information nº483, p.93.

 

 

Rendez vous à la Nuit des Idées à l’Institut Français de Tunis 26 janvier 2017

 

 

jeu, 26/01/2017 – 18:00

L’Institut français de Tunisie organise la première édition de la « Nuit des idées » à Tunis, dans ses locaux, le jeudi 26 janvier de 18h àminuit. Ce nouveau rendez-vous tunisien intitulé « Alors on pense ! » est une fête, un échange au service du vivre ensemble.

 

Née en janvier 2016 à Paris, la « Nuit des idées » est vouée à rassembler chaque année, à l’image de la Fête de la musique, des milliers de personnes de par le monde autour des idées, du débat public, dans un esprit festif et fédérateur.

 

Cette année, la « Nuit des idées » a pour thème « Un monde commun » et réunit des intervenants de renommée internationale invités à débattre dans tous les lieux partenaires de la manifestation, et sur les cinq continents : de Dakar à Los Angeles en passant par Bruxelles, Buenos Aires, Katmandou, Marseille, Paris… et Tunis, Sfax, et Sousse !

En Tunisie, cet événement se composera d’un grand nombre d’interventions d’intellectuels, artistes, musiciens, journalistes, humoristes, écrivains, sociologues, activistes… sous le format original d’une « revue parlée ». Une soixantaine d’invités se réuniront sous le signe du partage et de la libre expression, le temps d’une nuit, pour former le grand récit de cette nouvelle Tunisie confrontée à de nouveaux défis, bouillonnante d’idées, où s’invente un vivre-ensemble et se cherchent de nouveaux équilibres.

Au programme l’écrivain Kamel Daoud, l’humoriste Lotfi Abdelli, le chercheur François Burgat, l’artiste Nidhal Chamekh… Et les performances dessinées de Willis From Tunis, du collectif de dessinateurs Urban Sketchers, ainsi que le show philosophique d’Alain Guyard, « décravateur de concepts ». Le concert de clôture sera assuré par le jeune duo franco-tunisien Dhamma (Trip Hop oriental).

Cette soirée sera modérée par les journalistes Eric Angioletti (Europe 1, NRJ), Rokhaya Diallo (RTL, Le Mouv’, LCP), Rim Mathlouti (Arte), Zeyneb Melki (IFM), Gérard Sebag(Paris-Tunis), Isabelle Siri (Canal+, France2, Radio-France).

Cet événement est organisé en partenariat avec la radio IFM, qui émettra en direct depuis l’Institut français de Tunisie, et le magazine Paris-Tunis dont le premier numéro paraît en janvier 2017.

L’ensemble de ces échanges sera filmé et diffusé en direct sur une plateforme web accessible à tous : www.lanuitdesidees.com.

Petits comme grands, lycéens et étudiants, professionnels ou amateurs, passagers ou résidents, cet événement n’est à rater en aucun cas !

L’entrée est libre et gratuite. Espace de restauration sur place tout au long de la soirée.

 

 

Liste complète des intervenants :

Lotfi Abdelli, humoriste ; Azyz Amami, écrivain et « rigolutionnaire » ; Olfa Arfaoui, consultante pour la GIZ ; Olfa Belhassine, journaliste à La Presse et auteure ; Hédia Baraket, journaliste et auteure ; Hamdi Ben Chaabane, consultant international en informatique ; Hakim Ben Hammouda, universitaire, ancien ministre ; Karim Ben Smaïl, éditeur (Céres) ; Frédéric Bobin, journaliste et correspondant du journal Le Monde à Tunis ;Leila Bengacem, entrepreneure culturelle et fondatrice de Dar Ben Gacem ; Sébastien Boussois (France), chercheur en sciences politiques et consultant international ; Khalyl Bouzayene, formateur en développement personnel ; François Burgat, politiste et directeur de recherche émérite au CNRS et à l’IREMAM (Institut de Recherche et d’Études sur le Monde arabe et Musulman) ; Nidhal Chamekh, artiste plasticien ; Tarek Cherif, PDG de Connect ; Jean-Pierre Cling (France), administrateur de l’INSEE, conseiller résident de jumelage (IRD) ; Kamel Daoud, écrivain – Prix Goncourt du premier roman ; Karima Dirèche, historienne et directrice de l’IRMC ; Adnen El Ghali, architecte, urbaniste ; Anaïs Elbassil, présidente de l’association Terre d’Asile Tunisie; Riadh Ferjani, sociologue des médias, rédacteur en chef de Nawaat ; Jean-Pierre Frey (France), architecte-sociologue et professeur émérite à l’École d’Urbanisme de Paris ; Morched Garbouj, ingénieur en environnement et président de l’association SOS BIAA ; Mourad Ghassab, PDG de RFR ;Alain Guyard (France), philosophe forain, bonimenteur de métaphysique et décravateur de concepts ; Walid Hammami, directeur de l’espace culturel Cirta (El Kef) ; Jérôme Heurtaux, maître de conférences en science politique à l’Université Paris-Dauphine et chercheur à l’IRMC ; Adnen Jdey, chercheur en esthétique et philosophie contemporaine ; Emna Jeblaoui, directrice de l’Institut International du Développement Humain ; Wala Kasmi, présidente de l’association « Youth Decides » et lauréate du programme « La France s’engage au sud » ; Habib Kazdaghli, professeur d’Histoire contemporaine et doyen de la Faculté des lettres, des arts et des humanités de La Manouba ; Enrique Klaus (France), chercheur en science politique à l’IRMC et enseignant ; Arnaud Leroy, musicien et journaliste radio ;Islèm Mejri, membre de l’association « Mawjoudine » ; Thameur Mekki, journaliste indépendant ; Férid Memmich, représentant personnel du Président de la République auprès de l’OIF et membre du comité de rédaction du magazine Paris-Tunis ; Moncef Mezghani, poète ; Zied Miled, ingénieur en télécommunications et avocat ; Zoubeir Mouhli, architecte et directeur de l’Association de Sauvegarde de la Médina de Tunis ; Olivier Poivre d’Arvor, écrivain, ancien directeur de France Culture ; Mireille Razafindrako (France), économiste, directrice de recherche à l’IRD ; François Roubaud, économiste, directeur de recherche à l’IRD ; Aziza Sayah, militante de La Brigade des mères (France) ; Youssef Seddik, philosophe et anthropologue ; Massinissa Selmani, artiste plasticien ; Tahar Tahri, Président de l’Association de Sauvegarde des Oasis de Jemna ; Ridha Tlili, universitaire et directeur de la Fondation Ahmed Tlili pour la Culture démocratique ; Samir Toumi, écrivain ; Sara Toumi, entrepreneure sociale et lauréate du programme « La France s’engage au sud » ; Blamassi Touré, président de l’Union des Leaders Africains (ULA) ; Mémia Taktak, architecte (agence Dzeta) ; Laurent Thery (France), urbaniste, grand prix d’Urbanisme 2010 ; Rached Triki, architecte et fondateur de Urban Sketchers Tunis ; Willis From Tunis, enseignante en arts plastiques, peintre et dessinatrice.

 

 

http://www.institutfrancais.com/fr/actualites/nuit-des-idees-paris

https://www.institutfrancais-tunisie.com/?q=taxonomy/term/3570

 

 

 

سيباستيان بوسوا

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دكتور في العلوم السياسيّة، باحث مُشارك في مركز جاك بيرك (الرباط، المغرب)، وفي « بحوث وتعليم السياسة الدولية » (جامعة بروكسيل الحرّة)، وفي مرقب الشرق الأوسط وإفريقيا الشماليّة (جامعة كبيك في مونريال، كندا). مدرّس في العلاقات الدوليّة، مُحاضر ومستشار في الاستراتيجية السياسيّة والإعلام، وبالأخصّ فيما يتعلّق بالشرق الأوسط والقضايا الأوروبيّة – المُتوسّطيّة.

له مساهماتٌ عديدة في ميدان اختصاصه عن الصراع الفلسطيني- الإسرائيلي، وذلك عبر كثيرٍ من وسائل الإعلام في فرنسا وبلجيكا وسويسرا وكندا والعالم العربي.

 

RENCONTRE AU C.U.M A NICE AVEC JEAN-PAUL MARI, 3 MAI 2016

A l’occasion de la sortie d’Ulysse réveille-toi, ils sont devenus fous, le naufrage des relations euro-méditerranéennes (Erick Bonnier éditions), le CUM organise une rencontre le 3 mai à 19h avec Jean-Paul Mari, reporter de guerre et votre serviteur autour de « la question migratoire en Méditerranée ». Programme détaillé à venir.

www.cum-nice.org

 

cum nice

 

DOCTEUR EN SCIENCES POLITIQUES/ CONSULTANT INTERNATIONAL/ INTERNATIONAL CONSULTANT/ RELATIONS EUROMEDITERRANEENNES